Benkadi ou quand des personnes en situation de handicap cultivent l’espoir à Kankan

Benkadi ou quand des personnes en situation de handicap cultivent l’espoir à Kankan

Benkadi, association de personnes handicapées en Guinée, promeut leurs droits et développe l’agriculture pour améliorer leurs conditions de vie.

Créée il y a cinq ans, Benkadi, qui signifie « l’entente » en maninka, est une organisation de la société civile reconnue dans la région. Elle regroupe des personnes à mobilité réduite et œuvre pour la promotion de leurs droits, souvent bafoués dans nos communautés. Depuis sa création, cette structure a mis en valeur plusieurs hectares de terres agricoles afin de subvenir aux besoins de ses membres.

L’agriculture, fer de lance de Benkadi

Avec plus de 300 membres et une représentation dans les cinq préfectures de la région administrative de Kankan, Benkadi est composée de personnes aveugles, handicapées, sourdes-muettes, bref de personnes vivant avec un handicap. Malgré leurs difficultés, les membres de l’ONG ont réussi depuis plusieurs années à exploiter un espace rizicole dans la préfecture. Cet investissement leur permet de couvrir certaines charges. « Depuis la création de notre structure, nous sommes dans l’agriculture. La première année, on a obtenu 20 sacs de riz, l’année suivante 80 sacs, et cette année nous avons labouré plus de douze hectares. Nous avons voulu faire plus, mais malheureusement nous n’avons pas eu de machines au moment opportun », a expliqué Amadou Mara.

Une structure à fort impact

Cette association à but non lucratif est aujourd’hui reconnue par les autorités locales, qui lui ont accordé un agrément et d’autres documents officiels. En quelques années seulement, ses actions ont eu un effet tangible sur la vie de nombreux membres, comme le souligne son responsable, lui-même infirme depuis plusieurs années. « On ne peut finir d’énumérer tous les bienfaits de cette association pour des personnes vulnérables. Aujourd’hui, tout le monde connaît l’existence de Benkadi et cela constitue un acte fort pour notre protection. Quand un membre est malade ou accidenté, nous organisons une cotisation afin d’apporter du réconfort. C’est ainsi que nous procédons aussi en cas de maladie grave ou de décès d’un parent ou d’un membre de la structure. Nous avons aujourd’hui une caisse commune qui nous permet de faire face à certaines dépenses », se félicite notre interlocuteur.

Le cri de cœur de l’association

L’infirmité ne constitue pas un obstacle pour les membres de Benkadi. Ils s’organisent pour mener leurs activités champêtres et autres projets. Mais les difficultés demeurent, comme le rappelle Amadou Mara : « Nous voulons faire un jardin d’aubergines et d’autres cultures très prisées en Haute-Guinée. Nous sommes déterminés à le réaliser, mais il nous manque les moyens. Nous sollicitons auprès de l’État et des partenaires techniques et financiers un appui technique et financier ».

L’œil d’un sociologue

En Guinée, de nombreuses personnes à mobilité réduite survivent grâce à la mendicité. À Kankan, elles sont visibles devant les lieux de culte, les marchés et autres espaces stratégiques. Pour Victor Komano, sociologue et chargé de recrutement dans une entreprise locale, Benkadi peut servir de levier pour transformer cette réalité. « On pouvait déjà commencer par organiser des sessions de renforcement de capacités en développement personnel et en leadership. Une fois ces modules assimilés, beaucoup pourraient abandonner la mendicité et s’engager dans d’autres secteurs. Vous savez que la plupart des mendiants se déplacent avec leurs enfants, ce qui peut avoir un effet de contagion sur les plus petits. Il faut envisager de les structurer et de les accompagner », suggère ce diplômé de l’Université Julius Nyerere de Kankan.

Michel Yaradouno